Alain Délétroz

Est-il raisonnable d’affirmer que l’Occident est antirusse et qu’il n’a de cesse de traîner Moscou dans la boue? La politique de Vladimir Poutine aujourd’hui irrite et, certes, fait naître un discours très critique dans les médias des démocraties, mais l’Occident serait-il pour autant antirusse? Non! Cette affirmation n’a tout simplement aucun fondement historique.
La France, par exemple, a toujours été bien plus méfiante des visées de l’Angleterre que de celles de son allié russe. Et réciproquement! Durant les deux guerres mondiales, les démocraties occidentales se sont bien battues aux côtés des Russes contre les Reich allemand et autrichien, et non l’inverse.

One thought on “Alain Délétroz

  1. shinichi Post author

    L’Occident n’a jamais été antirusse

    par Alain Délétroz

    http://www.tdg.ch/reflexions/discours-vieux-deux-siecles/story/26272964

    Est-il raisonnable d’affirmer que l’Occident est antirusse et qu’il n’a de cesse de traîner Moscou dans la boue? La politique de Vladimir Poutine aujourd’hui irrite et, certes, fait naître un discours très critique dans les médias des démocraties, mais l’Occident serait-il pour autant antirusse? Non! Cette affirmation n’a tout simplement aucun fondement historique.

    La France, par exemple, a toujours été bien plus méfiante des visées de l’Angleterre que de celles de son allié russe. Et réciproquement! Durant les deux guerres mondiales, les démocraties occidentales se sont bien battues aux côtés des Russes contre les Reich allemand et autrichien, et non l’inverse.

    Après la chute du communisme, la préoccupation essentielle des grandes chancelleries occidentales a été d’éviter l’humiliation de la Russie. 1996: la Russie est invitée à rejoindre le Conseil de l’Europe alors qu’elle mène une guerre féroce en Tchétchénie. 1998: elle est admise au sein du très sélect groupe des pays les plus industrialisés, le G7 qui se rebaptise G8, alors que l’économie russe pèse moins sur la balance mondiale que celle de la Suisse.

    Dès 1994, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis poussent l’Ukraine et le Kazakhstan à remettre à Moscou leurs armes nucléaires héritées de l’Union Soviétique. En échange, ils se portent garants avec Moscou de l’intégralité territoriale de ces deux pays. N’est-ce point là une marque de confiance profonde dans le statut de grande puissance de la Russie aux dépens de ses voisins? L’Ukraine a bien remis ses missiles; quant au respect des garanties signées par la Russie, l’annexion de la Crimée et la guerre dans le Donbass parlent d’elles-mêmes…

    Le discours anti-occidental en Russie, en revanche, a pris une ampleur et une virulence inégalées avec le retour de Vladimir Poutine à la présidence en 2012. Le président russe n’a de cesse de vilipender les démocraties, qu’il voit comme une menace à son pouvoir. Il envoie ses avions de chasse vers les espaces aériens baltes ou portugais, comme au plus beau temps de la guerre froide. Sa formulation du concept «d’un monde russe» à défendre, non défini, met à mal la stabilité eurasienne: tous ses voisins qui abritent des minorités russophones se sentent désormais menacés. Le danger pour notre sécurité collective réside dans cette idéologie nouvelle et dans cette agressivité assumée. Prétendre le contraire est aveuglement.

    Lire: «Russie, les Cendres de l’Empire», par Alain Délétroz, dans la collection Ame des Peuples des éditions Nevicata, Bruxelles 2014. Alain Délétroz est cadre dirigeant en résidence du Geneva Center for Security Policy à Genève et chercheur associé du think tank européen FRIDE à Madrid.

    Reply

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *