Jean-Michel Normand

L’automobile n’a sans doute jamais été le théâtre de transformations aussi profondes et simultanées. Ces remises en cause qui mettent à mal nombre de certitudes et de valeurs solidement établies sont dictées par les impératifs environnementaux mais aussi par les nouveaux équilibres mondiaux et l’évolution des modes de consommation. Un remue-ménage qui conduit les constructeurs à renverser cinq totems automobiles.

  • Le diesel sacrifié
  • La berline détrônée
  • L’Occident dépassé
  • La conduite démodée
  • Le métier à réinventer

One thought on “Jean-Michel Normand

  1. shinichi Post author

    Electrification, conduite, location… La voiture sens dessus dessous

    Le monde de l’automobile est en plein bouleversement. Voici les 5 piliers qui vacillent.

    par Jean-Michel Normand

    https://www.lemonde.fr/m-voiture/article/2018/05/22/electrification-conduite-location-la-voiture-sans-dessus-dessous_5302650_4497789.html

    L’automobile n’a sans doute jamais été le théâtre de transformations aussi profondes et simultanées. Ces remises en cause qui mettent à mal nombre de certitudes et de valeurs solidement établies sont dictées par les impératifs environnementaux mais aussi par les nouveaux équilibres mondiaux et l’évolution des modes de consommation. Un remue-ménage qui conduit les constructeurs à renverser cinq totems automobiles.

    Le diesel sacrifié Le carburant qui, lors des vingt dernières années, avait donné une nouvelle impulsion au plus que centenaire moteur à combustion interne est en train d’accélérer sa chute. En France (comme en Europe), la part du diesel est passée sous la barre des 40 % des immatriculations alors qu’elle en totalisait les trois quarts en 2012. Le dieselgate a révélé l’incapacité de cette motorisation à suivre le rythme de l’abaissement des plafonds d’émissions polluantes et à effet de serre. Plusieurs marques telles que Nissan, Toyota, Porsche, Mitsubishi ou Volvo récemment ont annoncé leur décision d’abandonner à moyen terme la production de moteurs diesel. Ce brutal déclin impose une transition à marche forcée vers l’électrification de l’automobile, avec des modèles hybrides et 100 % électriques qui nécessitent des investissements considérables et une infrastructure dédiée afin d’assurer un maillage de stations de recharge. La pression des pouvoirs publics, en particulier les élus des grandes agglomérations, qui imposent des mesures limitant la circulation des modèles les plus polluants, hâte aussi le crépuscule des moteurs utilisant des carburants d’origine fossile.

    La berline détrônée Au début, le sport utility vehicule (SUV) n’était qu’un phénomène de mode. Aujourd’hui, il est en passe de devenir « la » référence. Sa part dans la production mondiale dépasse les 35 % et il a conquis tous les segments, tous les marchés. Cette marée montante plébiscitée par des consommateurs qui apprécient des véhicules dans lesquels ils se sentent protégés – y compris au plan psychologique – fait tomber la berline de son piédestal. En France, en 2017, ce type de carrosserie est passé sous la barre des 50 %. Aux Etats-Unis, où la berline pèse désormais moins du quart des ventes, Ford vient d’annoncer qu’il ne produira plus que des SUV. Compte tenu des moyens que mobilisent la transition énergétique et la numérisation de l’automobile « il n’est plus possible d’investir dans les projets qui n’offrent pas d’espace de rentabilité », explique le groupe américain. Fiat-Chrysler a déjà pris une décision similaire. Seul problème : la berline est, par définition, plus économe en énergie que le SUV…

    L’Occident dépassé Depuis toujours, l’Amérique et l’Europe ont donné le « la » des technologies et des modes automobiles. Ce principe est largement battu en brèche. La Chine est le premier marché mondial depuis 2009 et les Etats-Unis seront un jour ou l’autre dépassés par l’Inde. Ce déplacement vers l’est du centre de gravité n’est pas sans conséquences. Consciente qu’il lui faut réduire la pollution dans ses métropoles et qu’elle n’a aucune carte à jouer dans le domaine des motorisations traditionnelles, la Chine (27 millions de véhicules vendus en 2017 contre 18 millions en Europe) est devenue la locomotive mondiale de la voiture dite « propre ». Elle pourrait, dans les années qui viennent, devenir une puissance exportatrice. La Chine, qui impose la généralisation de l’électrification partielle ou intégrale, contribue à en faire baisser les coûts. Elle alimente aussi le succès mondial des SUV et, dans une moindre mesure, influence le style des nouveaux modèles.

    La conduite démodée L’avènement de la voiture autonome constitue un autre bouleversement. Les progrès de la robotique et de la numérisation, qui permettent à un véhicule de se repérer dans son environnement, autorisent déjà l’automatisation de certaines fonctions. Sur autoroute, les modèles récents réclament simplement du conducteur qu’il pose ses mains sur le volant ; la voiture assure elle-même le maintien en ligne et le respect des distances. La révolution en cours n’est pas seulement technologique. Elle porte en elle un transfert de la valeur ajoutée puisque le véhicule va devenir moins stratégique que l’intelligence artificielle qu’il embarque. C’est pourquoi Google ou Uber se sont fortement intéressés à la voiture autonome. D’où la grande peur des constructeurs, qui travaillent d’arrache-pied pour ne pas manquer le rendez-vous du véhicule sans chauffeur.

    Le métier à réinventer Désormais, une marque automobile se définit comme un « opérateur de mobilité ». Les restrictions imposées à la circulation urbaine, l’essor de l’autopartage comme du covoiturage, les changements dans le rapport à la propriété (on loue sa voiture en longue durée plutôt que de l’acheter) ou encore l’émergence attendue de flottes de robots-taxis vont bouleverser la façon de se déplacer, et pas seulement en zone urbaine. Dès lors, les constructeurs ne peuvent plus se contenter de n’être que des constructeurs. C’est pourquoi ils ont tous acquis ou créé ex-nihilo des sociétés proposant des services de mobilité. Même Porsche s’imagine, demain, comme le chef d’orchestre d’une super-conciergerie high-tech à destination de sa clientèle. Comme toutes les marques, la firme allemande, qui fête cette année ses 70 ans, doit aussi réinventer la recette qui a permis de faire que la voiture n’est pas un objet purement fonctionnel, dépourvu d’affect.

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