Baiser (Joachim du Bellay, 1542)

Quand ton col de couleur rose
Se donne à mon embrassement
Et ton oeil languit doucement
D’une paupière à demi close,

Mon âme se fond du désir
Dont elle est ardemment pleine
Et ne peut souffrir à grand’peine
La force d’un si grand plaisir.

Puis, quand s’approche de la tienne
Ma lèvre, et que si près je suis
Que la fleur recueillir je puis
De ton haleine ambroisienne,

Quand le soupir de ces odeurs
Où nos deux langues qui se jouent
Moitement folâtrent et nouent,
Eventent mes douces ardeurs,

Il me semble être assis à table
Avec les dieux, tant je suis heureux,
Et boire à longs traits savoureux
Leur doux breuvage délectable.

Si le bien qui au plus grand bien
Est plus prochain, prendre on me laisse,
Pourquoi me permets-tu, maîtresse,
Qu’encore le plus grand soit mien?

As-tu peur que la jouissance
D’un si grand heur me fasse dieu?
Et que sans toi je vole au lieu
D’éternelle réjouissance?

Belle, n’aie peur de cela,
Partout où sera ta demeure,
Mon ciel, jusqu’à tant que je meure,
Et mon paradis sera là.

One thought on “Baiser (Joachim du Bellay, 1542)

  1. shinichi Post author

    Joachim du Bellay

    Wikipédia

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Joachim_du_Bellay

    Joachim du Bellay est un poète français né vers 1522 à Liré en Anjou et mort le 1er janvier 1560 à Paris. Sa rencontre avec Pierre de Ronsard fut à l’origine de la formation de la Pléiade, groupe de poètes pour lequel du Bellay rédigea un manifeste, la Défense et illustration de la langue française. Son œuvre la plus célèbre, Les Regrets, est un recueil de sonnets d’inspiration élégiaque puis satirique et finalement encomiastique écrit à l’occasion de son voyage à Rome de 1553 à 1557.

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